mardi 12 mars 2024

Semi-Marathon de Cabourg 2024

je mets vingt-cinq secondes à franchir la ligne Patricia démarre sec normal elle a terminé ses dernières compétitions devant moi enfin sauf la dernière il y a huit jours où elle a jeté l'éponge ça arrive à tout le monde jamais vu ça moi qui croyais que les cinquante-six bornes du Glazig étaient le sommet du trail boueux quatre semaines plus tard nous connaissons l'enfer du trail Sud Touraine vingt-deux kilomètres de patinage semi-nocturne du jamais vu beaucoup d'abandons et ça se comprend j'ai bien fait d'opter pour la moyenne distance et puis j'ai fini premier de ma catégorie de vieux les autres étaient tous morts eh bien Patricia va-t-elle me refaire le coup du semi de Laval en me distançant nettement Cyril démarre au rythme que je lui ai indiqué cette course sera un test pour calculer la vitesse qu'il devra adopter pour son premier marathon à Saumur je l'entraîne et il le vaut bien ça fait vingt ans qu'il est avec ma fille Doriane et ils ont eu mes deux merveilles Arielle et Olivia Victor Hugo parlait de l'Art d'être grand-père je dirais plutôt le bonheur ça fait du bien de penser à mes grands chatons car le Sud Touraine d'il y a huit jours m'a laissé des traces heureusement que j'ai encore de la cuisse ce qui m'a permis de ne pas chuter mais ça tire sec sur la viande il fait frais mais beau c'est exceptionnel cette année de flotte et de re-flotte on sort de l'hippodrome et c'est déjà une ligne droite d'un bon kilomètre avec une épingle à cheveux en dessert j'ai opté pour onze virgule cinq de moyenne ça se passe bien mais qu'est-ce que je me fais doubler j'étais pourtant dans le bon sas ils vont trop vite on remonte vers la mer et on se retrouve sur la promenade presque trois kilomètres en ligne droite avec la Manche à gauche ça descend légèrement et c'est très agréable entre cinq et huit kilomètres je commence à mieux me sentir je n'ai dormi que trois heures cette nuit depuis que Lucas est devenu(e) Léa je dors mal je ne lui en veux pas pour cela et je l'aime toujours autant mais avoir une deuxième fille à mon âge et se retrouver en mai à défiler pour la Gay Pride alençonnaise ça peut surprendre et surtout déstabiliser je n'avais pas beaucoup de certitudes mais maintenant je n'en ai plus du tout depuis que je suis petit j'ai d'ailleurs l'impression d'être un morceau de bois pris dans le courant d'un torrent en furie c'est ce qui me pousse paradoxalement à être très organisé et précis Cyril s'en aperçoit avec le plan d'entraînement que je lui ai concocté avec des parcours calculés à la seconde près à Saumur je l'accompagnerai mais je dois calculer à quelle vitesse c'est pourquoi aujourd'hui je le laisse gérer son semi pour voir on tourne avant la Pointe de Cabourg pour brièvement longer la Dives une longue avenue puis une autre longue avenue on arrive au dixième kilomètre je suis à onze et demi pile un type qui a une bonne cinquantaine me dit qu'il veut faire une heure cinquante et qu'il trouve mon rythme régulier je vais vous suivre qu'il me dit je lui réponds que je ne suis pas encore sûr et lui indique Patricia que je viens de rattraper avec sa pancarte genre Metoo décorée de requins elle est meilleure que moi vous pouvez la suivre mais les squales l'impressionnent il choisit de rester derrière moi on reprend les mêmes avenues et on recommence pour un type qui vient de s'enfiler deux trails en moins d'un mois je semble plutôt bien j'ai même d'assez bonnes sensations c'est nouveau l'année a été compliquée Maman est morte depuis à peine quatre semaines toutes ces heures à lui tenir la main toutes ces semaines à voir l'aphasie l'enfermer en elle-même toutes ces années à la voir s'évaporer il y a deux ans à Noël lors d'un éclair de lucidité elle avait dit il ne reste plus grand chose de moi c'est vrai elle disparaissait lentement très lentement depuis cinq ou six ans au crématorium la cérémonie fut sobre avec ce texte de Loreena McKennitt qu'elle aimait tant j'avais tout organisé j'ai dit à l'assistance qu'il ne fallait pas être triste Maman avait eu une très longue vie et beaucoup d'amoureux il faut dire qu'elle était très belle et que ses photos des années cinquante faisaient penser au Studio Harcourt quatre-vingt-quinze ans c'est très long et on s'est bien occupé d'elle ma sœur et moi c'est comme si on nous avait enlevé un poids on a fait ce qu'il fallait faire c'est dingue le médecin qui a signé l'acte de décès il a quatre-vingt-cinq ans et il bosse toujours ce qui a permis à ma frangine de faire preuve de cet impertinent humour familial en disant j'espère qu'il n'est pas trop gâteux et que Maman était vraiment morte car la crémation ça a quelque chose de définitif  c'est ça un bel hommage finalement on lave avec des larmes et on fait briller avec des rires en cela la mort ressemble à la vie malgré toutes ces morts ces maladies ces drames je reste un incurable optimiste c'est hormonal sûrement me revoilà promenade Marcel Proust et ça va très bien je passe à douze à l'heure et je me mets à doubler de plus en plus de monde ça roule ça roule le long de la Dives Josette Doriane et mes deux Magnifiques m'encouragent Papy Papy il est où Cyril je réponds que tout va bien Patricia a dû être dépassée au ravitaillement et n'a pas réussi à remonter son retard il faut dire que je suis parfois à moins de cinq au kilo bon c'est pas le quatorze à l'heure d'il y a vingt ans mais ça va bien et il fait beau tiens pour fêter ça je vais encore accélérer histoire de faire la misère aux jeunes qui claudiquent parfois devant moi j'avale les derniers kilomètres en arrivant à l'hippodrome il y a une fille avec un maillot de club qui est portée par deux camarades elle défaille pas prudent on ne sait pas ce qu'elle a bon ils ne sont pas loin des secouristes un type qui a l'air dans mes âges est juste devant moi et il reste cinquante mètres je monte à quinze à l'heure pour le doubler on ne se refait pas je finis dans la première moitié du peloton avec un temps de une quarante-neuf trente-sept le type qui me suivait depuis le dixième arrive dix secondes plus tard il est content et me remercie de l'avoir aidé à battre son record il me demande de le prendre en photo Patricia finit à peine deux minutes derrière moi améliorant son chrono sur cette distance d'une minute et Cyril arrive trois minutes après en gagnant lui aussi une minute par rapport à ses deux premiers semi-marathons tout le monde est content je suis septième Msix sur vingt-six à un an et demi du Msept c'est pas si mal et même si je m'étais planté je serais quand même content car il fait beau et les filles vont batifoler sur la plage cet après-midi ma mère et mes petites-filles sont les jalons d'un cycle continu qui n'a ni début ni fin et ce serait dommage de mettre un point final à ce récit


 

 

vendredi 22 décembre 2023

Douze impressions, douze mois

Cette année, pas de commentaires sur mes douze photos préférées de l'année mais des haïkus (5,7,5) plus à même d'exprimer l'instant qui s'enfuit aussitôt saisi (Plus grand format en cliquant sur les images) .

Janvier
Forêt d'Ecouves

La forêt de verre
Au bord de l'année fragile
Sourire frissonnant


Février
Champfrémont

Dépouillé je suis
Le miroir des sentiments
Ignore ma douleur


Mars
Paris

Traverser le fleuve
Sans un regard en arrière
Au seuil du printemps


Avril
Alençon

Il pleut sur ton pays
Du feu, du fer et du sang
Et pourtant l'espoir


Mai
Belle-Île-en-Mer

Le chant des sirènes
A couvert le bruit des vagues
Sortir et renaître

 

Juin
Portsall

Absence de couleur
A l'extrémité du monde
Auprès de ma brume

 

Juillet
Alençon


Éclat de soleil
Posé sur un chardon bleu
Mon jardin d'été

Août
Barneville-Carteret



Heure dorée, quiétude
Ta peau, odeur de vanille
Les dents du soleil


Septembre
Alençon

Tels des funambules
Ils ont repeint l'avenir
En ombres chinoises

 

Octobre
Barfleur

Automne assoupi
Illusion d'éternité
Tu me prends la main

Novembre
Forêt d'Ecouves

Je ris sous la pluie
Tombent les gouttes et les feuilles
La vie sous mes pas


Décembre
Forêt d'Ecouves


 Ces étranges branches
À l'orée du matin calme
Le Monde à l'envers




lundi 18 décembre 2023

Cross FSGT de La Chapelle Près Sées 2023

Fichtrebleu, ça ne s'améliore pas la façon dont on traite les Traverseurs de Champs ! Il faut dire qu'on court pour la Fédération Sportive et Gymnique du Travail, la "roots" de chez "roots" organisatrice de cross comme on en faisait à l'époque Néandertalienne. En gros tu cours ou tu meurs ; seuls les combats rituels klingons à coup de Bat'leth peuvent donner une idée de ce qu'on a subi lors des quatre premiers cross FSGT de l'Orne.

Il faut dire que la météo a aidé, cependant après la patinoire du premier et le terrain de moto-cross en labours du troisième, je m'étais dit naïvement qu'on ne ferait point pire. Ben si !

Le club de la Chapelle Près Sées s'appelle Les Coureurs Pressés ; ils ont de l'humour à la campagne d'autant que leur maillot est orange (pressée...). Leur humour s'étend à la conception des parcours dans le genre "Pourquoi faire difficile quand on peut faire encore pire ?".


Les gamins s'y collent en premier et quand je dis colle je parle du sol qui adhère encore plus que Clément. Je suis toujours aussi admiratif envers ces petits qui affrontent de tels terrains dans l'inconfort hivernal. 

Une fois les gosses hourdés jusqu'aux cheveux, c'est au tour des ladies. Je descends dans le fond du champ classé X (réservé aux courses adultes) pour tâter le poulpe. Je ne suis pas déçu. C'est gélatineux !


Le fond de sauce planté d'une peupleraie est un marais où chaque foulée est flanquée d'un "floc". Cette partie est tracée en forme de M, on se demande de quoi c'est l’initiale...


Juste avant mon départ, j'avise un cadet local et je le chambre en lui reprochant l'aspect cradouille de sa tenue. Je suis caustique. Il aura sa revanche à l'issue de mon cross.

Merci à Trailer Sniper pour ses photos

Le principe du cross masculin (Hou les vilains machos hyper genrés !) c'est de faire partir les vioques (de 50 à 80 berges) cinq minutes avant les jeunes (de 20 à 49 piges). Seuls les juniors courent 5 000 mètres avec leurs grand-pères, les autres se mangent 7 km.


Je n'ai plus les moyens de partir fort mais l'entraînement trail m'a donné une certaine régularité. La première descente dans la pataugeoire se passe bien, la remontée aussi ; on est dans la moyenne boucle d'un kilomètre vite expédiée, plus que deux grandes boucles qui vont nous faire monter plus haut dans la prairie.


Je ne puis courir sans mes amicales têtes de Turc. Lucien en fait partie. Le jeu consiste à doubler certains camarades en essayant de ne pas se faire dépasser à son tour. Lors de la deuxième remontée, je passe donc Lucien et Schloc, je me vautre devant lui. Une longue pratique du Judo me permet de me redresser en trois secondes et je garde mes quelques mètres d'avance. A la fin du deuxième tour, il ne me reste plus grand monde à poutrer et les flèches du cross long ne cessent de me doubler non sans divers incidents...

Fallait mieux les lacer tes pompes !

J'aborde le dernier tour de deux km avec une certaine confiance...

Et là, l'incident regrettable, l'avarie, l'avanie. Splash ! La chute non-réglementaire : Waza ari awasate ippon (ou presque).

Je me relève avec la dignité de celui qui vient de péter en public lors d'une cérémonie de remise de médaille à l'Elysée. Je suis debout mais j'en suis couvert... 

Y'a plus qu'à monter une dernière fois vers l'arrivée sous les moqueries, quolibets et autres lazzis du public. Je tente cependant de rattraper Michel qui semble en difficulté dans les derniers hectomètres mais ma ressemblance avec la Créature du Marais l'effraie tant qu'il trouve un second souffle pour terminer quatre énormes secondes devant moi.

Il y en a un qui se marre bien en me voyant terminer, c'est le cadet que j'avais brocardé pour sa tenue fangeuse avant mon départ et il ne me rate pas en me voyant.

Faut bien dire qu'il n'a pas tort...



lundi 2 octobre 2023

Entomophoto 2023

Patiemment, depuis une dizaine d'années, je fais le catalogue photographique des insectes (et des quelques araignées) de mon jardin pensant un jour atteindre la centaine d'espèces. En fait, je suis à ce jour arrivé à 200 espèces d'insectes (voir les liens en fin de billet). Pour ce billet, je vais cependant m'attacher plus au niveau esthétique et expressif de ces bestioles que j'ai appris à aimer. Voici donc ma sélection de l'année 2023 du petit monde grouillant de vie de mon jardin. Je vous enjoins à cliquer sur les photos pour jouir des détails si vous les désirez.

 

Ce petit point noir avec une trompe est un charançon de l'iris dont il s'apprête à trouer les pétales. Trop mignon !


Dix fois plus grosse, la cétoine dorée me présente sa face de char d'assaut. Le compost dans lequel ses larves se développent me garantit la présence chaque année de ce bel insecte au vol vrombissant.

Cette chrysomèle de Banks me permet d'effectuer un camaïeu allant du rose pâle au rouge foncé. Cela dit, elle a l'air un peu perdue sur ce pistil.


Les mouches sont un monde à elles seules, cette petite anthomyie n'a même pas de nom en Français mais son nom latin est charmant : Botanophila Fugax !


Dans le monde des mouches, les syrphes sont un continent. Le plus courant des syrphes est certainement l'éristale tenace. Ce n'est pas le plus beau de la famille mais il est mis ici en valeur par un bokeh providentiel.

Son cousin l'éristale opiniâtre vaut ici par la richesse de ses détails. A un poil près...

Plus gracieux, l'éristale des fleurs a un surnom cocasse : la mouche Batman car il a le signe du super héros dessiné sur le pronotum, ce qui se voit mieux du dessus.

Mon syrphe préféré reste la volucelle zonée, énorme mouche assez gonflée pour imiter le frelon histoire de vous faire peur mais aussi, à l'aide de ses phéromones, de parasiter les nids de frelons en y pondant ses œufs. Balèze la mouche !

Puisqu'on en parle... en voici un de frelon. Ne vous fiez pas à son air revêche, le frelon asiatique est de loin le plus pacifique des deux frelons présents dans notre pays tant qu'on est à distance de son nid. Comme il est carnivore et aussi butineur, il est bien plus facile à photographier que son cousin européen qui lui, est uniquement viandard et peu commode.

Ici, la fleur a autant d'importance que l'insecte sur ce cliché. L'euodynerus dantici est une guêpe solitaire assez rare de la famille des eumènes.

Mon eumène préféré reste l'eumène unguiculé, la guêpe potière à la taille de... guêpe. Il s'agit ici d'un mâle, plus brun et nettement plus petit que sa femelle qui fait la taille d'un beau frelon mais l'élégance et la placidité en plus.

Après l'eumène unguiculé qui nous vient d'Espagne, voici l'isodonte mexicaine plus petite mais tout aussi élégante toute de noir bleuté vêtue. Elle fait partie de la famille des sphécidés, grands mangeurs de sauterelles dont j'ai récemment parlé.

On est ici à la limite au niveau qualité d'image malgré un joli bokeh : la lumière est un peu juste et l'animal minuscule mais ce gasterupion assectator femelle a un certain style avec son abdomen relevé et son ovipositeur qui lui permet de pondre dans les larves d'abeilles solitaires qui finissent bien sûr dévorées par sa progéniture.

Eh oui, 17 sortes de punaises répertoriées dans mon jardin ! Cette punaise des baies est une des plus jolies et elle participe ici à un petit festival de couleurs.


Fort jolie aussi la toute petite punaise de l'ortie. J'obtiens ici une photo graphique comme je les aime mais aussi expressive avec ce petit insecte décidé parti à la conquête du micro-monde.


Pour terminer, je cède à la facilité ; les papillons sont appréciés par tous et il est difficile de déplaire avec ce genre de photographie qui reste cependant un cliché... Le Vulcain présenté ici a achevé sa métamorphose fin septembre. Il aura la chance de vivre presque un an s'il arrive soit à hiberner soit à voyager vers le sud du pays car cette espèce migre facilement. 

 

Pour ceux qui veulent aller plus loin, les liens pour les 198 insectes et 13 araignées identifiés à ce jour dans mon jardin avec une fiche pour chaque animal :

 Coléoptères 1

Coléoptères 2

Coléoptères 3

Lépidoptères 1

Lépidoptères 2

Hyménoptères 1

Hyménoptères 2

Hyménoptères 3

Diptères 1

Diptères 2

Diptères 3

Hémiptères 1

Hémiptères 2

Odonates, Orthoptères, Dermaptères, Neuroptères, Blattidés, Mantidés 

Arachnides



 

 

vendredi 8 septembre 2023

Nils Frahm

Enfer et tablature, cela fait presque cinq ans que j'ai écrit ma dernière vraie chronique musicale. Et pourtant, mon blog continue de faire ses meilleurs scores sur d'anciens billets comme "Les Folies d'Espagne 1" qui compte des dizaines de milliers de lectures (42 300 en version blogger). Il faut dire que la politique publicitaire de You Tube m'a un peu refroidi en plaçant des publicités au milieu de certaines de mes vidéos (illicites, j'ai honte) comme la Follia de Vivaldi qui compte 21 000 000 de vues et qui ne me rapporte rien mais est monétisée par son véritable propriétaire (c'est normal). 

 

Nils Frahm

Honte sur moi ! Je ne connaissais pas cet excellent pianiste très prolifique qui glisse de plus en plus vers l'électro. C'est en m'apercevant qu'il avait collaboré avec Woodkid que je me suis intéressé à ce germanique individu.

Photo Nils Frahm.com

Je ne vais pas faire la bio de ce gamin quadra, vous la trouverez facilement. Il suffit de savoir que sa formation classique lui a permis d'évoluer vers un piano plus moderne (un mélange de Keith Jarret et Philip Glass) puis vers un électro très original que je qualifierai d'électro-analogique car Nils Frahm est un véritable amoureux du son dont il s'enivre parfois et qu'il produit à partir de machines et de claviers mais dont le son est produit en direct puis enregistré acoustiquement alors que nombre des musiques actuelles sont conçues directement sous forme d’échantillons montés sur écran. Le résultat est probant, la musique de Nils Frahm est pourvue de la chair qui manque souvent à bien des productions modernes actuelles.



Pour aller plus loin, quelques albums parmi la production déjà importante de l'artiste : 
 
All Melody : Fait à la maison avec des vrais morceaux d'acoustique et d’électronique : jouissif et abordable.
 
All Encores : Les magnifiques chutes de studio de l'album ci-dessus avec l'extraordinaire "All Armed".
 
Tripping with Nils Frahm : Le pendant en concert de All Melody (voir vidéo).
 
Spaces :  un autre live de 2013 enregistré sur différents supports avec de très belles parties de piano.
 
Music for Animals : Énorme production électronique de trois heures, une sorte d'océan sonore où l'on nage ou se noie selon ses goûts.
 
Winter Music : Petit album acoustique sensible et improvisé.
 
 

mardi 1 août 2023

Sphex addict

 

En balade du côté du Fort de Bertheaume à mi-chemin entre Brest et la Pointe St Mathieu, mon épouse et moi décidons de pique-niquer en ce lieu magnifique et quasiment désert. Au sol, je remarque des trous qui excitent ma curiosité entomologique.


Curiosité bientôt récompensée par l'arrivée d'une femelle sphex gryllivore (sphex funerarius). Je n'ai pas mon hybride ni même un compact expert mais mon téléphone portable. Je vais faire avec...

La bestiole s'envole bientôt puis revient rapidement avec de la compagnie qu'elle pose au sol : 


Apparemment une decticelle côtière femelle, une sauterelle de belle taille que le sphex a capturée et paralysée d'une bonne série de coups de dard (dont elle ne se servira jamais pour vous piquer) au niveau des centres nerveux de sa victime. Le grand Jean-Henri Fabre a décrit le comportement de ce type de sphégien en narrant ainsi le meurtre d'un grillon par un sphex à ailes jaunes, espèce très proche : 
 
"Les dispositions du meurtrier sont bientôt prises. Il se met ventre à ventre avec son adversaire, mais en sens contraire, saisit avec les mandibules l'un ou l'autre des filets terminant l'abdomen du Grillon, et maîtrise avec les pattes de devant les efforts convulsifs des grosses cuisses postérieures. En même temps, ses pattes intermédiaires étreignent les flancs pantelants du vaincu, et ses pattes postérieures s'appuyant, comme deux leviers, sur la face, font largement bâiller l'articulation du cou. Le Sphex recourbe alors verticalement l'abdomen de manière à ne présenter aux mandibules du Grillon qu'une surface convexe insaisissable ; et l'on voit, non sans émotion, son stylet empoisonné plonger une première fois dans le cou de la victime, puis une seconde fois dans l'articulation des deux segments antérieurs du thorax, puis encore vers l'abdomen. En bien moins de temps qu'il n'en faut pour le raconter, le meurtre est consommé, et le Sphex, après avoir réparé le désordre de sa toilette, s'apprête à charrier au logis la victime, dont les membres sont encore animés des frémissements de l'agonie." Souvenirs entomologiques, Jean-Henri FABRE, 1879, Ière Série, Chapitre 7.


On en est donc là, la victime, plus longue et plus grosse que son prédateur ne bouge plus. Une fois posée, le sphex chevauche sa proie et la traîne en direction de son trou en la tenant fixée sous son corps.


Voilà son trou parmi une bonne dizaine sur quelques mètres carrés. Même si cet hyménoptère ne vit pas en communauté, on peut le trouver en bourgade où chacun fait son trou à côté de celui des autres. Gare cependant au vol de proies qui se pratique entre prédateurs parfois indélicats. Le conduit est trop fin pour que le sphex puisse entrer avec sa proie sous le ventre, il abandonne fugitivement la sauterelle pour pénétrer dans son antre qui comporte deux ou trois loges et dont le fond est assez large pour y faire demi-tour.


Rapidement de retour, le sphex attrape sa proie par la tête et la traîne en marche arrière.


La sauterelle est toujours vivante et elle le restera assez longtemps pour servir quelques repas frais à la larve de son prédateur.


Une fois la sauterelle en place, le sphex va pondre un œuf de trois millimètres de long sur son thorax. De cet œuf sortira au bout de trois ou quatre jours une petite larve qui va dévorer progressivement la sauterelle toujours vivante mais paralysée. Puis la larve s'entourera d'un cocon où elle passera des mois avant de se nymphoser et finalement sortir de son enveloppe sous la forme d'un sphex adulte à la belle saison.