samedi 25 septembre 2010

Le Val d'Ecouves 2008


  ...à Laurence 

Il n’est pas loin de 14h30 quand j’arrive à Livaie, petit village en bordure de la forêt d’Ecouves. Les rayons impertinents d'un printemps présomptueux luttent encore contre de sombres nuées rageuses et dominatrices. Je pense à Laurence... 
Livaie, c’est un peu la rentrée des courses sur route dans la région. C’est aussi la répétition générale avant la grande classique locale : Alençon-Médavy.
Mon Mustang, en récupération après une crève carabinée a décidé de faire l’impasse sur cette épreuve trop courte pour son tempérament de Percheron diesel. Cela ne l’a pas empêché de me véhiculer gentiment  jusqu’ici. Il se contentera de faire le reporter pour notre club FFA, l’A3.

 Le Mustang reporter et Maurice le président de notre club 

Après avoir serré la main d’une bonne centaine de personnes, j’arrive enfin à la salle des fêtes où je vais chercher mon dossard. Dans la cour, je salue notre commentateur local, l’intarissable Gérard qui anime toutes les courses de la région avec son inextinguible bagout et son indéfectible bonne humeur.

 "Le" Gérard !

Parmi les dizaines de personnes que je salue, je ne puis que m'arrêter pour discuter un peu avec Claude, Président du club de Champfrémont et organisateur de la course de Multonne qui fait de la pub pour son épreuve située invariablement le 8 mai.


Si nous sommes arrivés assez tôt, c'est pour supporter Bin' qui va courir l'épreuve réservée aux Benjamins, à peine 1600m sur herbe. Ça ne le passionne pas plus que cela, d'autant plus qu'il n'y a pas foule sur la ligne de départ.


Le Bin' trouve le moyen de se faire poutrer par un microbe talentueux d'un autre club, une sorte de lutin pugnace...
Manquerait-il de jambes le gamin ? Il faut dire que Bin' avait mené l'entraînement du mardi à un rythme d'enfer : neuf bornes en 41 minutes. Ça doit laisser des traces !

Quinze heures trente approche, je vais m'échauffer avec La Mouette, le seul autre Kikoureur en lice. Nous allons tâter de la gâterie que nous réservent les organisateurs en fin de parcours : un mur de 300 mètres à vous faire vomir les poumons en haut de côte.

Une fois le monstre escaladé, nous rejoignons la zone de départ où je ressens comme une impression de déjà vu au niveau du côlon. Enfer et poutrage ! Pas cette fois-ci !
J'avise les toilettes jouxtant la salle des fêtes, il est encore temps... Las ! Je renonce à la vue de quelques représentantes du beau sexe qui font la queue devant les seules latrines officielles du site. Mon estimation de l'épaisseur de la porte et de ses piètres capacités en terme d'isolation phonique me fait redouter l'inévitable incident. L'avertissement abdominal que j'ai reçu est prometteur de tintamarre abominable. Je m'imagine mal sortir de ces toilettes sous le regard mi-amusé, mi-réprobateur de quelques splendides créatures venues là pour étancher un besoin tout aussi discret que naturel.
Serrons les fesses pour préserver l'honneur de la gent masculine.

Sur la ligne de départ, je fais le zouave avec La Mouette sous l'oeil un peu accablé des autres concurrents. 

 Les nains se font remarquer... 

Et nous y v'là ! On descend le bourg comme des malades. La Mouette a pris l'option défonce et me distance déjà de 50 mètres.

 C'est qui le débile qui a mis des lunettes de soleil ? 

Premier kilo en 3'57, ça va. Deuxième kilo en 3'40, ça descend presque tout le temps. Ce tempo rapide n'augure pas de performances exceptionnelles; les grimpettes vont refroidir tout cela.
Allez, on rentre dans la forêt, j'en profite pour raconter une ou deux histoires drôles pour déconcentrer l'adversaire...

 Là, vous voyez le gars, il va se manger un poteau de signalisation... un V2 de moins ! 

Comme si souvent, je me mets dans la Foulée de Francine, une championne locale dont le rythme est très proche du mien. Elle est première féminine malgré ses 48 balais... une championne, je vous dis.


La descente des Arcis en 3'25, ça poutre mais le juge attend bientôt le coureur présomptueux et son nom c'est "Côte du Jardin".
Entre le sixième et le septième kilo effectivement, je jardine, je bêche, je laboure, je motoculte ! Et je serre les fesses. Je ne suis plus qu'à 5'15 au kilo et je ne puis lâcher les gaz de peur d'avoir matière à le regretter, si vous voyez ce que je veux dire !
Un faux-plat puis encore une butte et ça redescend. Il reste deux bornes. J'aperçois soudain La Mouette à moins de deux cents mètres. La pluie se met à tomber, rendant encore plus superfétatoires mes élégantes lunettes de soleil. Cependant, pour un Lutin Normand, l'eau du ciel est promesse de renouveau et je retrouve un second souffle qui va me permettre de me rapprocher de mon ami et néanmoins challenger.
Le village approche, nous en faisons le tour. Entre le neuvième et le dixième kilomètre, c'est une descente très rapide. Manu La Mouette se retourne : horreur, le Lutin est à sa poursuite, il est sur ses basques, il le talonne, il le coude à coude.
Nous abordons le Mur de trois cents mètres ensemble, j'encourage Manu dans un hoquet respiratoire. "Te laisse pas faire La Mouette ! Pas par un V2 !"


Là, je dois dire que je me défonce. Je les monte à l'arrache ces hectomètres, les poumons en feu, les jambes en béton et l'anus cimenté... par prudence.
Deux minutes quinze pour faire trois énormes cents mètres, les pieds scotchés au sol. La Mouette reste derrière, fatigue ou simple sagesse ?
Je manque de vomir élégamment sur la barrière d'arrivée et je regarde mon temps : 44'54. Je suis vraiment une daube ! Chaque année je me dégrade. Pour vous donner une idée, le premier V2 a mis moins de 38 minutes pour ces 10km 311m, et il est plus vieux que moi ! 
Mets-toi à la belote, Lutin !
Ce n'est plus des cordes, ce sont des câbles qui nous assaillent. Mustang, mon cheval gardien m'apporte mon sweat-shirt. Je serre la main de La Mouette qui me battra au prochain trail et je me dirige vers la salle où doit avoir lieu la remise des prix.
Je me ravise soudain et me précipite vers les toilettes citées plus haut, fort heureusement désertes, que je repeins dans un grand élan créateur. Quelques mètres de papier plus tard, je rejoins Mustang et Manu dans la boîte de nuit où l'on doit distribuer les coupes. Je paie une bière à mes deux camarades, je leur dois bien ça.
A la première gorgée de bière, je sens qu'il y a un bug. Je cherche les toilettes du lieu et je les trouve. Les estimant fort accueillantes, je les visite trois fois de suite.

 Quand on est plié ainsi, on voit mieux le pavé... 

Ayant épuisé toutes les réserves papetières de la commune de Livaie, je demande à mon Mustang de ramener à Alençon la serpillière à figure à peine humaine qu'est Le Lutin.
Un oeil attentif sur la chaussée, un oeil terrifié sur le revêtement des sièges de sa voiture, mon ami s'exécute. Je n'ai plus qu'à aller me terminer à la maison sous le regard accablé de ma Josette.
Demain, après deux heures d'entraînement en forêt, cette galère paraîtra déjà lointaine et sera prétexte à une bonne grosse rigolade autour d'une excellente bière d'abbaye.



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